L'arrivée en Namibie a marqué définitivement notre sortie de l'Afrique subsaharienne et notre entrée (notre retour) dans le monde occidental. Le pays ayant été colonisé par les allemands, on retrouve de petites villes organisées à l'européenne, avec petites églises et placettes ombragées. Avec bien sur les inévitables supermarchés et centres commerciaux.

Elle nous parait déjà un peu loin l'Afrique ou l'on négociait le prix d'un avocat et de quelques tomates sur le bord de la route, ou l'on devinait l'existence d'un village caché de la route aux sacs de charbon laissés sans surveillance sur le bas-coté, ou l'on croisait des femmes revenant de la source, chargées de bidons d'eau...

Nombreuses surprises et découvertes nous attendaient dans ce pays dont on ne connaissait à peu près rien.

La Namibie, à l'instar de son voisin le Botswana, est un pays relativement vide d'humains: 2 millions d'habitants sur un territoire grand comme une fois et demi la France et principalement concentrés dans le Nord du pays. Notre trajet à vélo, de la capitale vers la frontière sud-africaine au Sud, est donc l'occasion de tater du désert. En moyenne un village tous les 200 km (ne pas oublier sa gourde...). Et par village on entend, une poignée de maisons le long de la route, une petite épicerie, une station service (indispensable dans ce pays  ou la voiture est vitale) et parfois un petit hotel.

On attendait l'immensité à perte de vue et on a été servi en Namibie: pistes ocres, jaunes ou blanches, montagnes bleutées ou roses selon l'heure de la journée, ciel d'un bleu pur et immaculé... Les paysages du Sud de la Namibie en jettent et on ne se lasse pas d'y perdre nos yeux.

Dès l'arrivée, on est surpris de voir que tout le pays semble abandonné à la propriété privée. Quasiment pas un kilomètre de route le long duquel on ne trouve de cloture: un peu frustrant pour le cycliste en recherche de camping sauvage dans ce paradis de nature désert. Souvent nos campements finiront à 10 mètres de la route, le long d'un grilllage. Contrainte finalement peu embarrassante vu le peu de monde qui parcourt les routes, surtout le soir. Et à la nuit tombée, ce n'est plus que nous et les phacochères!

Ces clotures encerclent des fermes gigantesques de plusieurs dizaines (centaines?) de km carrés, englobant les montagnes, les plaines; aucun bout du territoire namibien n'y échappe.  Pas de vaches ou cochons dans ces game farms comme ils les appellent ici (game comme gibier) mais des "élevages" d'antilopes, zèbres, autruches et autres kudus, pas centaines ou milliers. Un peu classe, de véritables réserves animalières privées. Ces beaux naifs sont destinés à finir dans les assiettes et les fermiers organisent régulièrement des chasses pour réguler le nombre d'animaux (et gagner leur vie). Pour notre plus grand plaisir, les restos offrent steaks d'oryx, brochettes de zèbres ou potées d'autruches.

Pas non plus de fermiers en salopette, fatigués du travail dans les champs. Fermier ici, c'est les vrais riches. Souvent des blancs issus de l'immigration allemande ou hollandaise, tous (très) bedonnants et habillés avec le combo short-chaussettes remontées, qui ont d'immenses maisons, emploient des dizaines de locaux et supervisent le tout au volant d'énormes 4x4 rutilants. 

Ce fut une de nos plus grandes surprises, découvrir à quel point la Namibie est un pays de blancs, au sud surtout, là ou sont les plus grandes propriétés.

Les relations entre les blancs et les indigènes du Sud, les San (ou Bushmen) sont perceptiblement compliquées pour le touriste qui découvre la Namibie. Les San, plutot brun clair de peau, occupent la région depuis des millénaires et on a même retrouvé dans peintures rupestres datant de milliers d'années dans les grottes du Sud du pays.

Les descendants des colons, les blancs donc, possèdent les terres et les San travaillent pour eux, dans une ségrégation un peu dérangeante. La propriétaire d'une petite supérette de campagne à qui on demandait combien d'habitants il y avait dans le village nous répond: "avec les travailleurs (les San donc), on est environ 30..." Ambiance.

La Namibie vraiment africaine se trouve dans le Nord, sur une bande de 150 km au sud de la frontière angolaise. La majorité de la population africaine, les tribus des très célèbres Himba notamment y vivent, plutot pauvrement. Ce peuple est l'un des rares, peut-être avec les Masai, à avoir conservé un mode de vie traditionnel. "Voir" les Himbas figure à ce titre dans les top 3 de tous les guides de voyage, avec le Parc Etosha et les dunes de Sosslusvlei. Dès le départ, on n'était pas trop emballé par ce coté safari humain et, même s'il serait sans doute fascinant de connaitre mieux cette tribu, en discutant avec d'autres voyageurs, on a été conforté dans l'idée que l'expérience ne nous plairait pas. Les Himbas sont vêtus de simples pagnes, les femmes vont seins nus, le corps et les cheveux enduits d'une poudre rouge, très photogéniques, ils vendent de plus en plus leur image de "peuple sauvage" aux touristes.

Photos payantes, il est assez fréquent de les retrouver le long des routes (voire aux abords du marché aux souvenirs de Windhoek), attendant d'être photographiés.